La Forêt, un milieu fragile
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La forêt accueille une faune et une flore diversifiées. Parmi cette faune, les ongulés sont les plus connus : cerfs, chevreuils, chamois et sanglier.
La forêt est pour eux un espace de vie où ils s'abritent, se reproduisent et s'alimentent. Cette alimentation est principalement composée de végétaux herbacés, semi-ligneux comme la ronce ou la myrtille, ligneux comme les jeunes arbres, et de fruits forestiers (glands, faînes …).
Leur présence se traduit par des impacts sur les jeunes arbres :
- abroutissement de la régénération naturelle, des jeunes plants ou des repousses de taillis par le cerf, le chevreuil (photo de gauche, abroutissement sur sapin) et le chamois.
- frottis qui sont liés à des comportements de marquage du territoire par le cerf et le chevreuil (photo du milieu, frottis sur peuplier),
- écorçage sur des arbres jusqu'à 20 à 30 cm de diamètre, par le cerf uniquement (photo de droite, écorçage sur épicéa commun).
Si le chevreuil impacte les régénérations forestières pendant quelques années, le cerf, quant à lui, peut avoir un impact pendant 20 à 30 ans voire plus, en raison notamment des dégâts d’écorçage aux perchis et jeunes futaies.
Les populations d'animaux trop importantes risquent de compromettre le renouvellement de la forêt, qui a pour rôle de produire du bois de qualité, issu d'espèces d'arbres variées (chênes, merisier, érables, épicéa, douglas, sapin…) et d'abriter une grande biodiversité.
Il est donc important d'adapter la population d'animaux présents à la capacité d'accueil de la forêt : c'est ce que les forestiers appellent l'équilibre sylvo-cynégétique. L’article L 425-4 du code de l’environnement précise : « L'équilibre sylvo-cynégétique tend à permettre la régénération des peuplements forestiers dans des conditions économiques satisfaisantes pour le propriétaire, dans le territoire forestier concerné ». Ainsi, la pratique de la chasse est indispensable en forêt.
Un déséquilibre croissant
La sous-estimation flagrante des effectifs depuis l’instauration du plan de chasse en 1976 induit des attributions de plan de chasse chevreuil et cerf souvent trop réduites. Les populations sont en constante augmentation, et par voie de conséquence les impacts en forêt également. A titre d'exemple, en France et en moins de 30 ans, le cerf a plus que doublé son aire de répartition et multiplié par quatre ses effectifs. Dans de nombreuses régions, on ne peut plus planter en forêt, voire régénérer naturellement, sans protection contre le gibier.
Les coûts de protection grèvent fortement la rentabilité forestière. L'objectif des sylviculteurs est d'obtenir un équilibre sylvo-cynégétique dispensant de protéger systématiquement les régénérations, qu'elles soient naturelles ou issues de plantations.
Dans la pratique, le sylviculteur ne maîtrise ni le niveau des populations, ni le niveau des attributions de plans de chasse ; certes, les plans de chasse ont fortement augmenté, mais les dégâts en forêt sont de plus en plus importants et découragent ainsi les sylviculteurs à investir en forêt.
Dans les peuplements mélangés de chênaie-hêtraie, le chêne beaucoup plus appètent pour le gibier que le hêtre, est systématiquement consommé : le chêne tend donc à disparaitre au profit du hêtre. Les changements climatiques en cours induiront une inadaptation de certaines essences sur une surface importante de la région : c’est le cas du hêtre ou de l'épicéa notamment. Il est donc important de mélanger dès à présent les essences (chêne, érable, alisier) et de privilégier les plus adaptées, ce qui est difficile voire impossible aujourd’hui sur certains massifs forestiers.
Par ailleurs, la surabondance des animaux provoque l’apparition de phénomènes de régulation, avec une baisse de la qualité des populations de gibier :
- chez le chevreuil, une réduction de la corpulence des individus, une baisse de la fécondité des femelles, une diminution des taux de survie juvéniles et des maladies chez les adultes
- chez le cerf, le ralentissement de la croissance des jeunes animaux, la réduction du poids des faons comme des adultes, la moindre reproduction des femelles et le faible développement des bois des mâles sont des conséquences directes et les plus visibles de ces déséquilibres.
Des solutions à mettre en oeuvre
- Avoir une politique de gestion des territoires intégrant l'équilibre sylvo-cynégétique
- Obtenir une indemnisation équitable des dégâts de gibier en cas d'absence d'équilibre sylvo-cynégétique. A défaut et dans l’attente, obtenir des financements significatifs d'outils de protection contre les dégâts
- Pratiquer une gestion cynégétique partenariale et équilibrée des massifs, en collaboration avec les fédérations de chasse, en ayant une meilleure répartition entre forestiers et chasseurs au sein des commissions départementales de gestion cynégétique
- Reconnaître et utiliser le « dire d'expert » des professionnels de la forêt et des moyens de suivi des populations (indices de changements écologiques - ICE) pour avoir une meilleure connaissance de l'évolution des populations et de leur impact sur le milieu
- Augmenter les plans de chasse dans l'objectif d'une baisse sensible des populations de cervidés sur les massifs forestiers avec un enjeu de production et où des problèmes sont signalés
- Pour les propriétaires qui ont réservé leur chasse, co-signer des demandes de plan de chasse avec leurs locataires
- Faciliter la réalisation des plans de chasse (mise en place d'un bracelet indéterminé…)
- Signaler les dégâts constatés grâce aux fiches de signalement existantes auprès de la DDT, du Syndicat, du CRPF et de la Fédération Départementale de la Chasse.